Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe – 13 octobre 2024 | Le rôle de l’éducation dans la protection et l’autonomisation des jeunes pour un avenir sans catastrophes.
M. Youssouf AMADOU
Spécialiste de Développement Durable
Observatoire du Sahara et du Sahel
« Donner à la prochaine génération les moyens de construire un avenir résilient ».
Chaque année, les catastrophes naturelles affectent des millions de personnes à travers le monde, provoquant des pertes humaines, économiques et environnementales importantes. Les tendances récentes montrent une augmentation de la fréquence et de l'intensité des catastrophes, accentuée par le changement climatique, l'urbanisation croissante et la dégradation de l'environnement. Selon le Bureau des Nations Unies pour la Réduction des Risques de Catastrophes (UNDRR), entre 2000 et 2019, plus de 7 000 événements majeurs ont été enregistrés dans le monde, touchant 4 milliards de personnes et causant environ 1,23 million de décès. Les pertes économiques dues aux catastrophes ont également augmenté, atteignant plus de 2 970 milliards de dollars américains sur cette période.
L'Afrique, en particulier, est l'un des continents les plus vulnérables aux catastrophes naturelles, en raison de sa dépendance aux ressources naturelles, de la pauvreté généralisée et des systèmes d'alerte précoce souvent inadéquats. Les catastrophes qui touchent fréquemment le continent incluent la sécheresse, les inondations et les cyclones.
La sécheresse est la catastrophe naturelle la plus fréquente et la plus dévastatrice en Afrique. La région du Sahel, par exemple, est régulièrement frappée par des épisodes de sécheresse qui affectent la production agricole, aggravent l'insécurité alimentaire et augmentent les migrations forcées. Selon la FAO, environ 36 millions de personnes dans 16 pays africains étaient menacées par des crises alimentaires en 2023, en grande partie en raison des sécheresses prolongées et de la dégradation des terres.
Les inondations sont devenues plus fréquentes, en particulier dans les régions de l'Afrique subsaharienne et de l'Afrique de l'Est. Les inondations de 2020 dans plusieurs pays africains, dont le Kenya, le Nigeria et le Soudan, ont déplacé des milliers de personnes, détruit des infrastructures et aggravé les problèmes sanitaires. L'impact combiné du changement climatique et de la mauvaise gestion des bassins hydrographiques amplifie ces risques.
Les cyclones, bien que moins fréquents en Afrique que dans d'autres régions du monde, ont un impact significatif lorsqu'ils se produisent. Le cyclone Idai en 2019, qui a touché le Malawi, le Mozambique et le Zimbabwe, a causé la mort de plus de 1 300 personnes et touché des millions d'autres, illustrant la vulnérabilité des États côtiers africains à ces phénomènes.
Les feux de végétation, souvent déclenchés par des activités humaines, impactent particulièrement l’Afrique australe et centrale. La déforestation et les pratiques agricoles non durables avivent ces incendies, qui détruisent les écosystèmes et réduisent la biodiversité.
Face à ces menaces, de nombreux pays africains s'efforcent d'aligner leurs stratégies nationales sur le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophes (2015-2030). Ce cadre met un accent particulier sur l’engagement des jeunes dans les politiques de gestion des risques mais il reste beaucoup à faire pour garantir une mise en œuvre inclusive et participative. Des initiatives comme le Système Africain d'Alerte Précoce (AEWS) de l'Union africaine et le Système d'Alerte Précoce Communautaire (SAPC) dans les communautés locales sont des exemples concrets de l'engagement africain à réduire les risques de catastrophes à l’échelle continentale.
La Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophes, célébrée chaque 13 octobre, met en lumière l'importance de la coopération internationale et régionale pour renforcer les capacités de prévention et de réponse face aux catastrophes. Elle appelle également à une action urgente pour répondre aux défis environnementaux qui aggravent la vulnérabilité des populations, notamment en Afrique. Le thème de cette année, « Le rôle de l’éducation dans la protection et l’autonomisation des jeunes pour un avenir sans catastrophes », nous invite à réfléchir à l’importance de l’éducation pour préparer la prochaine génération à faire face aux défis climatiques et environnementaux, notamment en Afrique, où les impacts des catastrophes sont exacerbés.
Autonomiser les jeunes, c'est leur donner les moyens d'agir pour réduire leur vulnérabilité et celle de leurs communautés. En Afrique, des initiatives innovantes impliquent de plus en plus les jeunes dans des projets de reboisement, de restauration des terres et de surveillance environnementale. Dans le cadre de l’initiative emblématique de la Grande Muraille Verte, par exemple, les jeunes jouent un rôle clé dans la lutte contre la désertification, renforçant ainsi leur propre résilience face aux impacts du changement climatique.
Par ailleurs, la technologie et les réseaux sociaux offrent aux jeunes africains des outils puissants pour sensibiliser, mobiliser et agir en faveur de la réduction des risques. Grâce à des plateformes numériques, ils peuvent accéder à des informations en temps réel et participer à des campagnes de sensibilisation ou encore proposer des solutions innovantes face aux catastrophes.
Dans ce cadre, l’OSS de par sa mission, accompagne ses pays partenaires dans le développement et la mise en place de Systèmes d’Alerte Précoce Multirisques communautaires (SAP-MR), ainsi que la sensibilisation des communautés locales et la formation des jeunes sur la gestion des catastrophes. En 2023, la collaboration entre l’OSS et ses partenaires du Bénin, du Burkina Faso et du Niger, a permis la formation de 3 300 personnes dont 1 400 élèves issus des communes riveraines du complexe W-Arly-Pendjari (WAP), à l’éducation environnementale et à la gestion de catastrophes grâce au Système d’Alerte Précoce Multirisques (Sécheresses, Inondations et feux de végétation) développé à cet effet.
Les systèmes d'alertes précoces (SAPs) sont un outil essentiel pour détecter et évaluer les risques et informer rapidement les autorités et les populations des menaces imminentes, permettant ainsi de prendre des mesures de prévention et de préparation. Que ce soit face aux catastrophes liées au climat telles que les ouragans, les inondations ou les séismes, ou face aux crises d'origine humaine comme les épidémies ou les conflits, les SAPs jouent un rôle crucial dans la protection des vies et des moyens de subsistance.
Sur le front de la diplomatie environnementale de cette année 2024, l’OSS organisera des évènements autour du SAP-MR à l’occasion des CoPs 29 sur le changement climatique et 16 sur la désertification, qui auront lieu respectivement à Bakou et Riyad. Notamment, la publication d’un document qui vise à offrir une vue d'ensemble des bénéfices des SAPs, en se basant sur les principales initiatives mondiales dans ce domaine. Il se focalise particulièrement sur le complexe WAP pour illustrer concrètement les principes et approches adoptés pour la mise en place de ce système. En soulignant le rôle primordial du SAP-MR du complexe WAP dans la protection des populations et des écosystèmes, ce document met en évidence la nécessité pressante de renforcer les capacités d'alerte précoce à travers tout le continent africain. Cela permettra de réduire les impacts des catastrophes naturelles et d'améliorer l'adaptation au changement climatique.
Ensemble, grâce à l'éducation, l’action et l’engagement des jeunes, un avenir plus résilient face aux défis climatiques est à portée de main. Les jeunes sont la clé d'un développement durable et d'une meilleure préparation face aux défis climatiques qui menacent leur avenir.