Journée mondiale de la vie sauvage 2023 | Ensemble pour la conservation de la vie sauvage

Je suis Mère Afrique, berceau de l'humanité et foyer ultime de certaines des espèces sauvages les plus emblématiques du monde ! Lions, girafes, gorilles…La liste est bien longue.

Mon identité est grandement marquée par ma vie sauvage qui joue un rôle vital pour la durabilité de mes systèmes écologiques et économiques.

En cette Journée mondiale de la vie sauvage, je vous invite, vous les humains, à reconnaître ma vraie valeur, à faire connaître ma vie sauvage inégalable et à travailler ensemble pour la préserver.

Maintenant, laissez-moi vous parler de moi !

La vie sauvage africaine est unique ! 

L'Afrique est merveilleusement riche, avec une faune sauvage exceptionnelle qui a su développer des stratégies uniques pour s'adapter et survivre dans un environnement bien rude.

L'Afrique abrite également le quart de la biodiversité mondiale ainsi qu’une panoplie d'écosystèmes variés, notamment des mangroves, des déserts, des forêts tropicales, des savanes et même des glaciers de montagne. Cette diversité de biomes a donné naissance à un grand nombre d'espèces endémiques : 4 539 espèces vivant dans les eaux douces (UICN) et 1 400 espèces d'oiseaux (Birdlife international), etc... Le gorille de Grauer, qui vit dans le Parc National de Kahuzi-Biega (PNKB) au Congo, est l'une des espèces les plus endémiques et les plus menacées du règne animal.

La vie sauvage, le pilier de l'humanité
La vie sauvage est bonne pour prendre des photos, mais pas que ; c'est l'un des piliers les plus importants de la survie de l'humanité. Selon le rapport d'évaluation de l'IPBES sur l'utilisation durable des espèces sauvages, 1 personne sur 5 dépend de la faune sauvage pour assurer ses revenus et sa nourriture. En plus, elle représente une partie essentielle de notre écosystème, stabilise l'environnement et permet de contrôler l'érosion et la dégradation des sols.

La vie sauvage africaine est le gardien ultime des communautés locales

La vie et les moyens de subsistance de nos ancêtres africains ont toujours été liés à la vie sauvage qui fût pour eux une inspiration spirituelle et culturelle. Ils ont toujours montré du respect pour chaque animal comme le léopard, symbôle de noblesse, de férocité et de courage.

Par ailleurs, la faune sauvage aide à lutter contre la dégradation des sols et contre le changement climatique, et surtout, elle joue un rôle primordial dans la croissance économique et la durabilité de l'Afrique.

Je vous explique comment ! 

La faune sauvage contribue à la préservation des terres en Afrique. Les animaux diminuent l'érosion des sols en maintenant l'équilibre de la végétation. En effet, les primates, les éléphants et les antilopes jouent un rôle important dans la dispersion des graines, le maintien de la végétation locale, le contrôle naturel des ravageurs et la prévention du surpâturage. Ainsi, leur conservation prévient la déforestation et la dégradation des sols et maintient un niveau élevé de biodiversité. 

La faune sauvage aide à lutter contre le changement climatique. En préservant des habitats sains tels que les forêts, la vie sauvage contribue à l'augmentation de la végétation et à atteindre des niveaux importants de séquestration du carbone. Comme le révèle l'article « The role of large wild animals in climate change mitigation and adaptation », paru dans la revue « current biology», les grands animaux contribuent fortement à l'atténuation du changement climatique, car ils modifient le régime des feux et refroidissent la surface de la terre en réfléchissant plus de radiations solaires.

La faune sauvage protège la croissance économique de l'Afrique. Elle offre de nombreuses opportunités de croissance économique en Afrique à travers différents secteurs tels que l'écotourisme, l'agriculture, le marché du carbone, les produits forestiers non ligneux et les produits animaux. Selon le rapport "State of the Wildlife Economy in Africa", l'industrie des safaris en Afrique est estimée entre 12,4 milliards USD (revenus directs) et 42,9 milliards USD (total). De plus, en 2019, les voyages et le domaine du tourisme en Afrique ont contribué de 7,1 % au produit intérieur brut (PIB) et créé 24,6 millions d'emplois (WTTC, 2020). Néanmoins, le maintien d’une exploitation durables et inclusives, reste une condition essentielle pour aligner la conservation de la faune sauvage au développement économique en Afrique et à la prospérité des communautés locales. 

Pourquoi est-il urgent de préserver la faune sauvage africaine ? Que faire ? 

La richesse de la vie sauvage africaine subit une forte pression avec les pertes croissantes d'espèces et d'habitats. Selon l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), plus de 6 400 animaux et 3 100 plantes en Afrique sont menacés d'extinction. Cette menace est principalement alimentée par une combinaison de facteurs humains tels que le braconnage, le commerce illégal, le conflit homme-faune sauvage et la perte de l'habitat. Ces menaces sont exacerbées par les impacts du changement climatique tels que l'extraction des ressources, la déforestation et les épisodes de sécheresse. La sécheresse qui a frappé le Kenya et qui a anéanti 2% des zèbres les plus rares au monde (le zèbre de Grévy), et augmenté la mortalité des éléphants, est une preuve vivante des menaces qui pèsent sur la faune sauvage africaine.

Maintenant que je vous ai presque tout dit, permettez-moi d'ajouter une dernière chose. En cette Journée mondiale de la vie sauvage qui se tient sous le thème "Ensemble pour la conservation de la vie sauvage" et dans les 8 années qui vous restent pour atteindre les Objectifs de Développement Durable des Nations Unies, j'aimerais que vous reconnaissiez qu'il est plus qu'urgent de reconsidérer les conséquences de vos activités et de travailler ensemble pour la restauration de la richesse de ma vie sauvage, de mes populations et de mes habitats.

Pour ce faire, voici quelques recommandations qui pourront vous aider tout au long de votre parcours : 

• Développer plus de projets pour créer des opportunités de revenus grâce à la conservation, et travailler avec les communautés locales afin de réduire les conflits homme-faune sauvage.
• Renforcer les partenariats avec les autorités des aires protégées.
• Travailler sur l'introduction et l'encouragement de l'utilisation de l'agriculture intelligente face au climat et des alternatives énergétiques durables.
• Réglementer la transhumance et le bétail autour des aires protégées.
• Encourager l'utilisation des nouvelles technologies pour surveiller la faune sauvage dans les aires protégées telles que la mise en place de systèmes d'alerte précoce et le déploiement de drones et autres systèmes informatiques.
• Travailler sur la restauration des parcs nationaux dégradés tels que le Parc National de la Garamba (Congo – Kinshasa), le Parc National de Kahuzi-Biéga (Congo) et le Parc National du Manovo-Gounda St Floris (République Centrafricaine), tous inscrits dans le patrimoine mondial de l'UNESCO.

Quelques références :  
Le rapport d'évaluation régional de l'IPBES sur la biodiversité et les services écosystémiques pour l'Afrique https://zenodo.org/record/3236178
Rapport d'évaluation sur l'utilisation durable des espèces sauvages https://ipbes.net/sustainable-use-assessment
https://www.ox.ac.uk/news/2022-03-03-large-mammals-can-help-climate-change-mitigation-and-adaptation#:~:text=The%20researchers%20highlighted%20three%20key,the%20sun)%20and%20fire%20regimes.
https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/SSC-OP-054-Fr.pdf
https://www.birdlife.org/wp-content/uploads/2021/03/soab_2017-english_final.pdf
https://portals.iucn.org/library/efiles/documents/rl-6-001.pdf
https://www.cbd.int/gbo/gbo4/outlook-africa-en.pdf
https://www.iucn.org/content/west-and-central-africas-wildlife-trouble-shows-new-iucn-report
https://africacenter.org/wp-content/uploads/2023/02/Biodiversity-Threatens-Human-Security.pdf
Snyman, S., Sumba, D., Vorhies, F., Gitari, E., Enders, C., Ahenkan, A., Pambo, A.F.K., & Bengone, N. (2021). État de l'économie faunique en Afrique. African Leadership University, School of Wildlife Conservation, Kigali, Rwanda.

Auteure
Olfa Sehli
Biologiste marine, écologue